Un chef-d’œuvre au cœur des convoitises
Créé en 1432 par Jan et Hubert Van Eyck, l’Agneau Mystique, également appelé « L’Adoration de l’Agneau Mystique », est une pièce centrale de la cathédrale Saint-Bavon à Gand. Considéré comme l’un des plus grands trésors de l’art flamand, ce retable à volets est admiré pour ses détails méticuleux, l’usage révolutionnaire de la peinture à l’huile et ses symboles chrétiens. Mais, au-delà de son importance artistique, ce sont les nombreux vols et péripéties autour de cette œuvre qui ont forgé sa légende.
6 siècles, 13 vols : un record !
L’Agneau Mystique détient un triste record : il est l’œuvre d’art la plus volée de l’Histoire. Depuis sa création, ce polyptyque a été volé à treize reprises, lors de six événements distincts. La première saisie date de 1794, lorsque les troupes françaises l’ont emporté à Paris. Le tableau a été rendu après la chute de Napoléon, mais ce ne fut que le début d’une longue série d’appropriations illégales.
En 1816, plusieurs panneaux ont été vendus à un marchand d’art bruxellois, pour finir dans la collection privée du roi de Prusse. Après la Première Guerre mondiale, ces panneaux ont été récupérés par la Belgique dans le cadre des réparations de guerre. Et ce n’est pas tout : pendant la Seconde Guerre mondiale, Hitler lui-même a ordonné que l’Agneau Mystique soit transporté en Allemagne, où il fut caché dans une mine de sel. C’est grâce aux efforts des célèbres « Monuments Men » que l’œuvre fut sauvée et ramenée à Gand.
Un vol non résolu, où sont les Juges intègres ?
Le vol le plus mystérieux de l’Agneau Mystique reste celui de 1934, lorsque deux panneaux du retable ont été dérobés par Arsène Goedertier, sacristain de l’église. Si l’un des panneaux, représentant Saint Jean Baptiste, a été restitué, le second, intitulé « Les Juges intègres », demeure introuvable à ce jour. Goedertier est mort sans révéler l’emplacement de ce panneau, malgré des recherches intensives menées par la police belge. Une fidèle reproduction a été réalisée, mais le panneau original n’a jamais refait surface.
Pourquoi tant de vols ?
Pourquoi l’Agneau Mystique a-t-il été l’objet de tant de convoitises ? Plusieurs raisons expliquent cet intérêt. Tout d’abord, sa valeur artistique et historique est inestimable. Ce polyptyque est non seulement une prouesse technique, mais il est aussi empreint de symbolisme religieux, ce qui lui confère une dimension spirituelle unique. Ensuite, sa taille imposante et sa composition complexe en font un défi logistique pour les voleurs, mais aussi un trophée de choix. Enfin, son statut de trésor national belge lui a conféré une visibilité internationale, attirant les collectionneurs et les régimes en quête de prestige.
Une restauration spectaculaire
Entre deux vols, l’Agneau Mystique a également été restauré à plusieurs reprises. La dernière restauration, achevée en 2020, a révélé des détails originaux qui avaient été cachés sous des couches de peinture ajoutées au fil des siècles. Le changement le plus notable concerne le regard de l’agneau : auparavant dissimulé, le regard intense et frontal de l’agneau, qui symbolise le Christ, a été restauré à sa forme originelle. Cette restauration a permis de redécouvrir la puissance visuelle et émotionnelle de l’œuvre.