La sombre histoire du zoo humain de Tervuren

Histoire

29/03/2024

3 minutes

L'AfricaMuseum, autrefois connu sous le nom de Palais des Colonies, trouve ses racines dans l'exposition universelle de Bruxelles en 1897. Initiée par le roi Léopold II, la "Section coloniale" de Tervuren a été conçue pour promouvoir son projet colonial au Congo. Cependant, cette entreprise a pris une tournure sombre, transformant un groupe de 267 Congolais en véritables prisonniers exposés comme des curiosités dans un zoo humain. Cet événement, loin d'être isolé, s'inscrit dans une triste tradition de zoos humains qui a contribué au racisme persistant dans les sociétés occidentales.

Propagande coloniale et divertissements : L’exposition internationale de 1897 a été le théâtre de la construction du « Palais des Colonies » à Tervuren, un projet conçu par Léopold II pour séduire la population belge et attirer des investisseurs vers son entreprise coloniale. Ce lieu, orné de salles d’exposition présentant des animaux naturalisés, des échantillons géologiques, et des produits congolais et européens, était censé être un outil de propagande.

En plus du Palais des Colonies, le parc de Tervuren abritait diverses attractions, dont un monorail, un hippodrome, un vélodrome, et même des villages congolais. Ces derniers, clôturés et peuplés de force par 267 Congolais, étaient censés démontrer la réussite du projet colonial du roi.

Une exhibition meurtrière

Malheureusement, la réalité derrière cette façade était bien plus sombre. Les conditions déplorables dans lesquelles étaient maintenus les Congolais, combinées à un été froid et humide, ont conduit à la maladie et à la mort de sept d’entre eux pendant l’exposition. Leurs corps ont été enterrés dans des lieux non consacrés, déclenchant une polémique dans la société belge.

Pratyeka, CC BY-SA 3.0, via Wikimedia Commons

Conséquences et héritage

Malgré les critiques, la Section coloniale de Tervuren a attiré plus d’un million de visiteurs à la fin de l’exposition. Le Palais des Colonies a été transformé en 1898 en un musée permanent du Congo, préfigurant l’actuel AfricaMuseum. Ce n’est que des années plus tard que les corps des Congolais décédés ont été déplacés dans un lieu de sépulture approprié.

Un parmi tant d’autres

Le zoo humain de Tervuren n’était pas un cas isolé. Il s’inscrit dans une culture occidentale d’exotisme, avec des exhibitions similaires organisées en Belgique, en France, au Royaume-Uni, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Suisse, en Italie, en Espagne, en Autriche, et même aux États-Unis. Ces spectacles contribuaient à perpétuer l’idée de supériorité occidentale en présentant les personnes de peau foncée comme inférieures.

© Groupe de recherche Achac / priv. coll.

La fin du zoo humain ?

Malgré l’évolution des mentalités, des pratiques similaires ont persisté au fil des décennies. L’Expo 58 à Bruxelles a également présenté un « village congolais », suscitant des polémiques et des plaintes. Les événements plus récents, comme celui à Yvoir en 2002, rappellent que la soif d’exotisme et le voyeurisme envers l’Autre persistent dans la société contemporaine.

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Le zoo humain de Tervuren reste un sombre témoignage de la propagande coloniale, de la souffrance humaine, et de l'exotisme dégradant.

Bien que le monde ait évolué depuis cette époque, il est crucial de reconnaître et de comprendre cette histoire pour lutter contre le racisme persistant dans nos sociétés actuelles. Le devoir de mémoire est essentiel pour éviter que de telles pratiques ne se reproduisent et que l’humanité ne retombe dans les pièges de l’exotisme déshumanisant.